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Christophe Crampette
Christophe Crampette
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8 novembre 2008

Le ministre de la désintégration scolaire

Il ne se passe pas un jour sans que Xavier Darcos, ministre du démantèlement de l’éducation nationale ne nous assaille d’annonces tonitruantes sur les nécessaires réformes qu’il compte mette en œuvre pour notre bien à tous. Je comprends tout à fait, que dans le cadre d’un plan de communication bien établi, il faille à tout prix masquer les conséquences réelles des suppressions massives de postes, mais les procédés employés relèvent la plupart du temps de la manipulation voire de la malhonnêteté intellectuelle. Prenons-en quelques exemples.

Il établit le fait que malgré les moyens mis en œuvre, le système de remplacement des professeurs absents ne fonctionne pas de façon tout à fait satisfaisante. Certes, on en partage le constat, mais examinons les raisons mises en avant. Il déclare que les moyens dégagés en remplacement ne sont utilisés qu’à 80% de leurs capacités et qu’au même moment près de 10% des professeurs absents ne sont pas remplacés.

Il tente alors de nous faire croire par le biais d’un raisonnement simpliste, que lui-même sauf à faire insulte à son intelligence ne peut envisager de croire, que les deux taux pourraient être liés. Examinons l’affaire de près. La France est organisée en autant d’académies que de départements, elles même divisées en circonscriptions rassemblant environ une centaine de classes. De plus, la fonction des remplaçants est de répondre à une absence souvent due à une maladie de l’enseignant titulaire.

Or, il semblerait que les enseignants fassent preuve en l’occurrence d’un manque de coopération qu’il faut absolument dénoncer. Ils s’obstinent à tomber massivement malades au cœur de l’hiver ou à l’occasion de phénomènes épidémiologiques qu’ils pourraient quand même éviter. Parfois même, certains poussent le vice jusqu’à tomber malade à Lille alors que des remplaçants sont disponibles à Marseille.

Je proposerai bien deux solutions à notre cher ministre. Tout d’abord demander aux enseignants de mieux planifier leurs arrêts maladie, en instituant par exemple un roulement ou une programmation pour mieux les répartir sur l’année. Ensuite, il pourrait peut être récupérer les deux Airbus que veut revendre notre cher président pour transporter rapidement les remplaçants là où on a besoin d’eux.

Trêve de plaisanterie, le plus grave est qu’il se sert de ces raisonnements d’analphabète pour justifier la création d’une agence nationale de remplacement, qui, j’en fais le pari, sera rapidement privatisée et sous-traitée à des entreprises privées qui s’enrichiront en embauchant des vacataires sous-payés et mal formés. On atteindra ainsi éventuellement 100% de remplacement mais à quel prix et pour quelle efficacité. Néanmoins, les bonnes âmes pourront être rassurées, il y aura un adulte devant chaque classe. Qu’importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse.

Il y a quelque semaines, on dérape (tout à fait consciemment) sur l’incongruité de former des enseignants à Bac + 5 pour changer des couches et surveiller la sieste des enfants. Il est incroyable d’employer de tels arguments, car qui a déjà vu un enfant avec des couches à l’école ? Ils n’y sont simplement pas admis et c’est absolument normal. Quand aux heures de sieste, elles sont généralement propices à l’organisation de décloisonnements ou d’activités de soutien au sein des autres classes. Laisser des doutes sur le sujet laisse à croire que chaque après-midi, plusieurs milliers d’enseignants se tournent les pouces au fond de leur classe. D’ailleurs tout le monde a bien entendu déjà vu des institutrices se faire dorer au soleil en début d’après-midi, faire leur tricot voire même se rendre chez le coiffeur, c’est très habituel.

Aujourd’hui le coup de grâce nous est asséné, non pas par Saint-Xavier en personne, mais par un autre ministre, chargé de déposer la bombe pour tester les réactions. Elle nous prévient que l’école maternelle à 2 ans sera supprimée et remplacée par un système de jardins d’enfants payants. Quel progrès extraordinaire, alors que toutes les études prouvent l’apport essentiel d’une scolarisation précoce pour les enfants issus de milieux socialement défavorisés. Nul doute que ces derniers se précipiteront pour bénéficier de ce nouveau service payant. Ce serait bien la moindre des choses avec toute la générosité dont fait preuve la société envers les chômeurs, les RMIstes... On ne va quand même pas payer pour eux. Certes certains peuvent le penser, mais je suis persuadé qu’on en paiera le prix au centuple dans quelques années quand on mesurera les dégâts accomplis.

La suppression des RASED est un des autres méfaits imputable à cette association de création de délinquants. Pour qui connaît le système, l’éducation nationale consacre depuis très longtemps un certain nombre de moyens destinés à lutter contre l’échec scolaire.

Il est d’ailleurs important de rappeler, que contrairement à ce que l’on veut nous faire croire, ce n’est pas l’école qui créée l’échec scolaire, ce serait bien le comble. Par contre, on est obligés d’avouer qu’elle ne parvient pas à en réduire les conséquences et à limiter son importance. Certains enfants parviennent dans les classes avec des déficits culturels importants, des retards significatifs dans la construction du langage et des concepts éducatifs de base non installés. Ils se trouvent tout simplement dans l’incapacité d’aborder des apprentissages fondamentaux. L’école doit alors s’efforcer de remédier à ces handicaps par un travail éducatif qui se substitue à la famille avant d’aborder les contenus scolaires.

J’ai par exemple fréquemment rencontré des enfants de six ans ne maitrisant aucun concept de langage (les notions de fruit, d’animal, de groupements en général ne représentent pas pour eux une globalité dans laquelle on regroupera des éléments distincts), ou n’ayant jamais rencontré d’autres écrits à la maison que les publicités distribuées dans la boîte aux lettres. Dans certaines familles on ne parle aux enfants que pour l’accomplissement des gestes quotidiens : se laver, manger, dormir. Le dialogue n’existe pas, sans parler de l’argumentation ou du raisonnement. Ce sont en général des familles qui « s’occupent » assez bien de leurs enfants mais sont incapables d’envisager ou de mettre en place une action éducative en dehors de quelques réflexes qui relèvent plutôt du dressage.

Alors les RASED aidaient à réparer ces dommages, s’occupant des enfants en petits groupes ou en individuel, s’efforçant de réparer les injustices liées à un déficit des parents dont ils n’ont souvent eux-mêmes pas conscience.

  où la malhonnêteté apparaît une nouvelle fois, c’est quand on veut nous faire croire que les 60 h de soutien le soir compenseront ces suppressions. Il est en effet évident que des enfants en difficulté, qui souvent manquent de sommeil ou vivent dans des conditions matérielles difficiles, ne pourront être disponibles et réceptifs à des enseignements supplémentaires au-delà d’une journée de travail de 6 h, la plus longue d’Europe pour des jeunes enfants.

L’escroquerie ultime est de prétendre que puisque l’école ne parvient pas totalement à gommer ces écarts, c’est que le système ne fonctionne pas, et que donc, si on le supprime ça ira forcément mieux. Il est insensé que de tels arguments puissent être utilisés sans considérer ses interlocuteurs comme des attardés mentaux.

Les exemples seraient ainsi très nombreux et quasi quotidiens. C’est peut être leur répétition qui anesthésie les réactions. Néanmoins ces beaux messieurs de la droite décomplexée sont très habiles. Ils distillent chaque jour une prime pour l’un, un léger avantage pour l’autre tout en les fustigeant pour leur incapacité et leur incompétence sous-entendue.

L’opposition s’opposant surtout à elle-même et les syndicats incapables de mesurer et de réagir à l’ampleur du démantèlement, tant ils étaient habitués à la cogestion du ministère et aux avantages induits, nous assistons à une gigantesque entreprise de démolition d’un des fondements de notre société républicaine. L’aboutissement ultime sera l’instauration d’un chèque éducation aux parents qui marquera la privatisation ultime de ce service public. On maintiendra tout juste les apparences en conservant quelques écoles publiques dans les quartiers les plus en difficulté pour rassurer les bonnes consciences.

Lisez-donc ces propos tenus le  7 novembre 2008 par Xavier Darcos :

« On essaie d'accréditer l'idée que mon action ne serait pas guidée par une préoccupation de justice sociale. Tout ce que nous faisons, sans exception, a pour but de nous occuper de ceux qui ne vont pas bien. Nous voulons donner à tous ce dont les gens aisés disposent de par leur situation. Donner, dans l'école publique, ce qu'on trouve parfois dans l'école privée : un temps différent, une écoute, un certain rapport aux familles... Donner ce qui, habituellement, s'achète. Alors quand j'entends dire que je serais dans une logique purement libérale, cette critique me blesse. Heureusement, du côté des familles, ces mesures sont plébiscitées. »

Je pense qu’il s’agit d’un des propos les plus scandaleux qu’ait tenu un ministre de l’éducation nationale. C’est une véritable insulte envers les enseignants du service public et un gigantesque mensonge devant l’opinion publique.

J’attends désespérément une réaction.

Bonnet_d__ne

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Commentaires
C
Les ministères de l’Education nationale et de l’Enseignement supérieur viennent de lancer un appel d’offres pour assurer une « veille de l’opinion », autrement dit suivre tout ce qui se dit et s’écrit dans les médias sur les sujets les concernant. Le premier y consacre un budget de 100.000 euros, le second de 120.000 euros.<br /> <br /> <br /> « Il n’y a pourtant là rien de nouveau, s’étonne-t-on rue de Grenelle, tous les grands ministères - le Travail, la Défense, etc – ont une telle « veille ». Nous évoluons avec les medias: comme les blogs, tchats et autres forums prennent de plus en plus de place, nous les suivons de plus en plus. » Le ministère souligne que tout cela se fait dans la transparence: le marché public a ainsi fait l’objet d’une annonce publiée au BOAMP (Bulletin officiel des annonces de marchés publics) le 4 novembre 2008.<br /> <br /> Dans l’appel d’offres daté du 15 octobre, la Délégation à la communication commune aux deux ministères cite entre autres objectifs de cette « veille »: « identifier les thèmes stratégiques (pérennes, prévisibles ou émergents); repérer les leaders d’opinion, les lanceurs d’alerte et analyser leur potentiel d’influence et leur capacité à se constituer en réseau; décrypter les sources des débats et leurs modes de propagation; anticiper et évaluer les risques de contagion et de crise», etc.<br /> <br /> Outre la presse, les «sources surveillées» sont sur Internet: sites «commentateurs» de l’actualité, médias en ligne, sites de syndicats, de partis politiques, sites militants d’associations, de mouvements revendicatifs ou alternatifs, de leaders d’opinion, moteurs généralistes, forums, blogs, pages personnelles, appels et pétitions en ligne…
C
Crise = antisémitisme? C’est ce que redoute Xavier Darcos, qui s’est exprimé vendredi devant la convention nationale de l’Union des étudiants juifs de France (UEJF). Le ministre de l’Education craint que la crise économique actuelle ne réactive des réflexes antisémites, en raison de «la recherche de responsables». «Il faut se méfier des périodes de crises, surtout économiques, qui ont tendance à jeter les groupes les uns contre les autres, à la recherche de responsables», a-t-il déclaré, ajoutant: «Quand on fait référence à la crise de 1929, ce qui me fait peur c’est ce qui a suivi la crise.» Le ministre a invité l’Education nationale et les associations à s’appuyer sur les outils existants et à en développer d’autres pour lutter contre le racisme.<br /> <br /> Dans le même genre, on pourra dire que la canicule alimente le racisme, que les inondations favorisent la montée de l'intégrisme... <br /> Que ne faut-il pas faire pour faire oublier l'essentiel !!!
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