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Christophe Crampette
Christophe Crampette
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15 octobre 2008

Quand jeter un papier trahit une absence de liberté.

Quand jeter un papier trahit une absence de liberté.

Je me rappelle d’un incident survenu il y a presque vingt ans alors que j’étais encore enseignant à Lomme.

Un élève de mon école, qui par ailleurs n’était pas passé par ma classe (il venait d’arriver dans le groupe scolaire) mange son goûter sur le trottoir devant l’école. Il ouvre son paquet de biscuit et jette ostensiblement le papier par terre. Etant situé juste derrière lui, je lui demande spontanément et fermement, mais sans agressivité de le ramasser. Il s’exécute sous les yeux de sa maman qui me fixe droit dans les yeux et lui dit : remets le par terre. L’enfant eut un temps d’hésitation et s’exécuta.

J’en suis resté sans voix, tant l’incongruité de la démarche maternelle me sembla alors surréaliste.

Néanmoins, j’en tirai plusieurs enseignements :

Tout d’abord, il a du sembler insupportable pour la maman de constater l’irruption d’un élément extérieur dans un domaine qui lui semblait relever de la responsabilité parentale, quand bien même mon intervention aurait pu lui sembler opportune.

Mais surtout, il m’a fallu admettre que ma croyance en une « bonté » présupposée de l’être humain  relevait d’un optimisme qu’il fallait relativiser. La notion de bien et de mal marque souvent sa limite devant le mur des intérêts individuels

J’ai à cette occasion, encore plus pris conscience de la nécessité de l’éducation (que je distingue bien de l’instruction entendons-nous) pour permettre à l’individu d’atteindre une conscience nécessaire à l’exercice de sa propre liberté. En effet, pour être capable d’effectuer des choix raisonnés, il faut, je pense être en mesure d’analyser son propre rapport avec le monde. Il est nécessaire d’en connaître les règles et de les comprendre pour d’une part les accepter et d’autre part s’en servir pour bâtir son propre référentiel. Celui-ci guidera nos choix personnels et nos trajectoires individuelles. A défaut, on prend le risque de nous laisser guider par notre seule animalité laissant l’arbitraire, l’intérêt à court terme ou le seul affectif prédominer.

Nous vivons dans un monde où on a voulu nous faire croire que la liberté individuelle s’épanouirait dans la liberté collective, sans doute en réaction au modèle collectiviste qui s’est écroulé avec le mur de Berlin. En fait cette soi-disant liberté a surtout été un prétexte à une dérégulation et une absence de contrôle qui, on le sait, a considérablement profité à une poignée d’individus tout en restreignant considérablement les libertés du plus grand nombre. Là où le système était très fort, c’est qu’il a pu faire croire qu’il n’y avait pas d’autre possibilité et que chacun finirait, un jour, par en profiter à son tour. Nos libertés ont considérablement reculé depuis trente ans, même si notre niveau de vie a largement progressé. Nous ne sommes plus en capacité de peser sur les choix de notre société. Ce pouvoir nous a été confisqué au nom d’une soi-disant liberté collective plus libératrice.

Je suis persuadé que le salut viendra de l’éducation. Il nous faut, en agissant au quotidien à l’école, dans nos familles, dans les associations… favoriser l’acquisition d’une véritable liberté individuelle en donnant à chacun les outils qui lui permettront d’exercer ses propres choix. C’est, je pense l’enjeu essentiel d’une société de liberté, mais on comprendra vite le danger que peut représenter pour certains systèmes la capacité individuelle à réfléchir, comprendre et choisir.

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